LE VAINQUEUR 2020-10-01 Le vainqueur Un jeune fils de Neptune imberbe, un peu hawaïen, dessine sur l'eau des souplesses de courbes fluctuantes en ondes et vagues marines venues des lointains en quête de rivages fleuris. Il dit l'élégance de la vie sur une eau agitée, d'un vol plané facile mais sous-marin, une face cachée des choses qu'il maîtrise sans effort, petit prince des étoiles scintillantes de temps anciens innocents, sans dents de la mer ni monstre à tentacules dressés. Un léger sillage effleure la surface d'une réalité passagère, d'une pente d'énergie en mouvement qui lui donne la vitesse d'une petite planète, un monde à part dans un micro-cosmos de molécules bienfaisantes où les glisses sont des caresses ; les virages dessinent les arabesques d'une sustentation engendrée par des portances d'esprits de nature, suggérant d'autres dimensions de création ; pas mystique pour autant, bras, jambes et tronc se fondent dans un nouvel homme de Vitruve qui entraîne les instants, guide la trajectoire d'un mouvement. Il s'est évanoui sur le sable de la plage, une apparition redevenant jeune homme, reparti entre des groupes de promeneurs, un dimanche au bord de la mer. C’est comme un bibelot souvenir, à mettre dans une collection sur une étagère. Je l'ai vu. Le temps s’est écoulé d'un fort fort lointain à un sémaphore où flottent d'utiles pavillons. Il y a un fleuve entre ces gardiens de l’estuaire ; plateau rocheux noir, vases à reflets moirés, bouées vertes, courant de marée et couleurs du temps changent le paysage avec l'éclairage. Il y a des taches de lumière. Des scintillements éblouissent entre les nuages. Divers oiseaux marins passent, suspendus sur l'horizon, au raz de l'eau, ou plongeant en une éclaboussure d'écume. Les vraies joutes sont-elles celles des chevaliers sous les oriflammes au vent, ou celles des pierres, des eaux et des airs, avec quelques lichens ou cristes-marines dans les interstices ? Il y a l'invisible, quelque part, comme un jeu de clepsydre cachée par Vauban, hors des salles voûtées, sous des supports d'arquebuse, qui ne tient qu'à un fil d'araignée, de Dyneema ou de Spectra, un défi de la pesanteur, à voir sur fond de rayures de noms de matelots sur les murs. Les défis de jeunesse se perdent parfois dans le ressac. Goutte d'eau et grain de sable. Pascal Legrand Visiteurs : 119 Retour à l'accueil |