PASSÉ LE PONT 2014-03-23



Vers le dénuement nous allons
Que nous le voulions ou non, nous cheminons
Pèlerins malgré nous
Sans signe, sans coquille ou bâton
Petites silhouettes sur la lande ou sur le plateau
Au long des halages, au parvis des cathédrales
Aux ruines des chapelles de campagne,
Un pas devant l’autre, une pause
Pour un verre, un pain, une source,
Un abri quand les grêlons rebondissent
Quand la glaise colle aux semelles
Quand la pesanteur l’emporte avec lourdeur
Breloques et possessions terrestres sont un ballast inutile
Pour l’envol ; la voie des brises ou des bourrasques
Est une route de migration tracée de traditions, de haltes,
De cercles et de triangles, à l’exception des dimensions galactiques
Et cosmiques, où se perdent esprits et cendres volantes
Nus, dénudés, et pourtant aux nues et nuées,
Légers anges virevoltants voltigeant
Buses au printemps, milans, émouchets
Ou vanneaux posés dans les grands champs.
« Frères humains qui après nous vivez »
Ne clouez pas chouettes effraies et corbeaux
Aux portes de chêne et de châtaigner
Des granges bientôt abandonnées.
Que restera-t-il de tangible dans l’essentiel du baluchon
Quand d’un auguste élan, dernier regard devant
Tu feras le dernier pas vers le vide du ciel ?
Même les souvenirs s’effacent
Sur les parois de préhistoire, glyphes polis,
Runes évanouies dans les brumes
L’ineffable l’emporte, insaisissable,
Instant temporel invisible
Le bruit de l’explosion lointaine
Est une feuille qui tombe.
Il n’y a pas de grimoire, de donjon, de pouvoir
Ni château de cartes ni boule de cristal ni tour d’ivoire.
Velours d’apparat, manteau d’hermine, or, argent, brocarts
Dans les malles les coffres les cryptes
Sont devenus poussière sans lumières ni scintillement.
Intranquillité du moment
Les particules élémentaires s’enfuient, se replient.
Je marche sur un chemin de campagne.


Pascal Legrand

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