JEAN ANTOINE FARGO 2007-10-06

Jean, comme mon père, car on n’échappe pas à ses gênes.
Antoine, comme St Exupéry, car on ne peut oublier ses rêves.
Fargo, comme la diligence des westerns, elle vous emmène quelque part, de toute façon, et vous ne savez pas trop de quoi le voyage sera fait ; les hors-la-loi vont-ils attaquer ou arrive-t-on à bon port ?

C’est mon nom. Je ne suis pas encore arrivé. Je voyage dans les canyons, mais pas seulement. Je cherche des fonds, pas seulement marins, même si je suis prêt à plonger. J’ai mis une annonce :
« Cherche mécène pour défi-machine entretien et fabrication».
Ce qui donne pour le dossier de presse :
Sponsors wanted for challenge-machine maintenance et manufacture, satisfaction guaranteed.

Après j’explique que le cercle est l’élément philosophique de base de ma démarche. Un cercle Zen bien sur, souple comme un roseau, léger comme l’orbite d’un satellite. Un pédalier pour tout dire. Spécial quand même.

Car il est dans un œuf. Attention les dents pour la coquille.

Depuis cette histoire avec la poule, l’œuf est le symbole du temps. Il y a tout dedans pour subsister quelque temps. Evidement, Colomb (Christophe) a montré qu’il ne tenait pas bien droit dans tous les sens, mais depuis nous avons pensé à lui mettre des stabilisateurs sur les cotés. Oui, pour les vieux œufs, on peut dire des béquilles. Le contact avec la réalité qui entoure l’œuf est toujours un peu dur, et noir comme le tarmac.

C’est que l’œuf est un monde à part, admirablement profilé. D’un point de vue abstrait le cercle et l’œuf entretiennent une relation privilégiée, une alliance qui leur permet d’écarter les lignes de pression, de diminuer les traînées parasites ; dès lors on entend mieux la musique, sauf que dans mon cas, j’ai les poumons qui font soufflet de forge. C’est bruyant.

Normal : mon grand oncle était forgeron, maréchal ferrant. C’est de lui que je tiens mon talent pour taper sur tout ce qui me résiste avec un marteau. Mais c’est une autre histoire.

Je suis dans l’œuf comme le ver est dans le fruit. Retour à l’état fœtal certainement. Même pas né, même pas mal. Elégant, caréné, aérodynamique. Efficace. Déjà beau alors qu’à peine sorti du cul de la poule.

Je n’oublie pas les plumes.
Lisse, sensuel, un peu en sueur par certaines chaleurs.

Je n’oublie pas l’eau. D’ailleurs, je flotte. Si je veux. Je mets les nageoires sur les roulettes et vogue le submersible du Capitaine Namo, avec un peu de plomb dans l’aile, et dans la cervelle, pour descendre, mais pas trop bas ; « trop de pression ».

Avec mes plumes en cellules solaires, je suis aussi limité vers le haut. L’oxygène, le froid. Explorateur solitaire dans ma capsule. Espaces infinis vers les étoiles. Effrayant de silence disait Pascal.

Comme je suis un peu fainéant, je reste souvent entre le haut et le bas. On peut dire sur la route. Ne croyez pas que c’est parce que je me dégonfle, ou que je manque d’air, même si on me le demande à l’occasion.

Il y a un truc, bien sur. Le chaud lapin est dans le chapeau. Mystère de la surface du miroir magique. Félin au regard énigmatique. L’eau du lac se ride du passage du ragondin, qui plonge. Bruissement de feuilles. L’air vibre de couleurs ; les ondines photoniques dérivent sous leurs ombrelles. Phasmes, libellules et vers luisants.

Le mouvement n’est pas monotone, car le temps change de dimension. Retour aux roulettes stabilisatrices pour les ralentissements vers l’enfance, accélération de fusée vers le futur dans les descentes. « Rocket science », sans bruit ni flamme. La flemme oui. Je rentre les coudes. Toujours ça de gagné. A cette vitesse, je suis presque déjà arrivé à demain, un jour meilleur où j’aurais été bon. Je ralentis un peu au souvenir des podiums d’hier. Amusants trophées. Il y a les mêmes aujourd’hui, et pourtant, il y a une nuance. Comment va-t-on faire pour avoir de vieilles photos sépia avec nos ordinateurs. Pardon, j’oubliais la palette de couleurs…

Pour la vitesse du futur, celle de la lumière, je vais mettre l’effet tunnel et la grande clarté au fond, mieux que le X1 et le mur du son. Effet spécial de l’invisible, juste là, devant moi. Je peux le toucher. Il m’entoure comme la peau de ma vie. Je freine, j’accélère, de décolle, je m’enfonce dans les algues au milieu du courant.

A quel sommet de l’œuf se trouve le point fixe ?

Coordination et pilotage : avec la roue, je pousse le pied droit pour aller à gauche, avec le manche à droite vers la droite, avec la barre l’inverse. J’ai parfois du mal à garder le cap, ou à prendre le bon angle de virage. Certains disent que c’est l’âge, d’autres que j’ai l’expérience. Au fond, tout se mélange. Il reste la forme. L’œuf.

Wells Fargo. Wells. La machine à remonter le temps. Les vieux films. Il faut tourner les manivelles, les plateaux, les bobines. J’aimerais bien voir le film sans trop d’effets secondaires (non ! pas les dents sur le goudron). Je suis resté très primaire. Petit prince du plateau, des steppes. Je n’ai pas trouvé mon renard argenté, tout juste la fourrure polaire qui me tient chaud aux pieds. J’ai vu l’harfang aux yeux interrogateurs.

Les uns disent que toutes ces formes allongées évoquent sans poésie une des médications favorites de français, selon les anglais.

Soyons prudents. Restons polis. L’état de surface compte en effet pour une part non négligeable dans la performance, dont chacun connaît les facteurs.

La semaine prochaine, je parlerai de l’art et du sens de la beauté plastique. Soyez à jeun et à l’heure. Merci


Pascal Legrand

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