RIO AZUL BLUES 2006-11-23

Je peux toujours essayer de vous raconter ma vie, car vous savez bien que la vérité ne sort pas de la bouche de l’autobiographie. Surtout que si la plume court sur le papier, l’idée flotte et dérive dans la tête. Ça se finit souvent en cocotte minute alambiquée.

Je suis un petit gars de la grande banlieue. Pas malin, pas méchant, mais je m’en suis sorti. Il faut toujours s’en sortir. Au début, l’homme, qui n’en était pas encore un, a voulu sortir de l’eau. Après il y a eu la fôret, mais ça n’a pas duré. Maintenant, en gros, il aimerait bien pouvoir se tirer de cette planète qui commence à sentir le roussi. Faudra peut-être muter. « Tu montes, chéri ? Il faut qu’on travaille un peu sur le code génétique et les boosters au propergol ».

Aujourd’hui, il y a moins de spiritualité et de romantisme, mais plus d’efficacité. C’est en fonction des buts que nous avons définis. Vous ne vous souvenez pas ? Et bien, c’est du genre plus de puissance, plus de capacité ; plus, tout simplement. Toujours plus. Hasta la victoria, siempre ! Il ne faut pas que je me disperse dans les langues. C’est une tendance aujourd’hui. Culture et communication. Mais il faut aussi garder ses racines. Manger des racines, carottes, topinambours, gingembre…. C’est bon pour la santé. Heureusement, on mange de moins en moins d’animaux morts. C’est meilleur pour notre karma. Moi, quand j’ai un coup de blues, je n’hésite pas, je vais à la karmacie et j’achète des plantes exotiques.

C’est un peu grâce aux plantes que je m’en suis sorti. Certains voient là une régression au stade végétal. Je vous ai dit qu’on ne pouvait pas oublier ses racines. Nous avons combiné horticulture et génétique. Pas qu’avec la binette. Trop facile. Ça a donné l’hortoculutre. Après la pensée parallèle, nous utilisons la perpendiculaire. Mon ass-ohsiée (ça vous la coupe) et moi avons exploité le vieux projet de planter des choux pour y faire naître les bébés.

C’était plus facile parce que mon associée s’appelle Rubylips, ce qui veut dire que je l’embrasse avec plaisir, un peu comme Roger-le-lapin et la blonde aux seins en zeppelin.

Elle n’aimait plus les orties (-), mais aimait faire des folies (-), lire des bds, manger des saucisses, et réparer des tondeuses et des Mortoculteurs. J’aime l’éclectisme, surtout quand il ne fait pas trop de bruit. Souvent il cliquète, et il faut penser à lubrifier le mécanisme.

Nous avons donc implanté les embryons, dans leur gousse de haricot, dans des choux, dehors dans des champs. C’est quand même mieux que le meilleur des mondes.

On n’obtient jamais les mêmes résultats avec les changements climatiques. Il y a une évolution na – tu – relle. Bio si vous préférez. Pendant un temps, la société se dirigeait plutôt vers l’éprouvette. Des histoires de contrôle qualité. Chez nous quand il y a un coup de gel, le CQ se fait tout seul. Au départ, il fallait arroser l’été, chauffer sous serre l’hiver. Galère. Chaque année, la récolte était compromise. Angoisse et négociation de subvention. Fini tout cela. A l’air libre. Endurcis. Survie en milieu hostile. Nous les aidons avec quelques pesticides. C’est un peu comme des vaccinations, ça éloigne les pucerons.

Nous avons beaucoup de bisannuelles. A l’automne et au printemps, les éclosions sont magnifiques. On entend un petit bruit le matin quand ils crèvent le choux. Les bébés gardent un pied dedans : ils ressemblent aux angelots, aux amours sur les cartes postales. Et plus de cordon ombilical en plein milieu du ventre. Au bout du petit doigt de pied, c’est quand même plus discret pour le nombril. Avant les petits étaient toujours sur le ventre ou sur le dos. Maintenant, ils ont le temps de s’habituer à leur posture d’adulte, et ils ne nagent pas dans leurs matières fécales, qui par ailleurs sont recyclées comme engrais (mélangés aux feuilles du choux).

« Are we happy ? » comme disait Travolta dans Pulp fiction. Oui. Nous arrivons à faire des parcelles spécialisées, en fonction des couleurs et des métiers. Tout dépend de la petite graine. Tenez, là-bas, c’est le carré des secrétaires noires. Ici, nous avons les coutumières, en bouton évidement. Nous sommes parfois obligés de mettre les énarques en hors sol, ils sont encore fragiles. Mais tout se vend. Je sème à tout vent. Whappy culture des Mayas.

C’est un métier enrichissant. Nos avons développé le secteur R et D. il y a encore des difficultés avec la graine de politicien honnête. Mais c’est du raffinement.

Reste le problème du changement climatique à venir dont l’influence est difficile à modéliser. Il y a des sceptiques : le mercenaire sur « blogdenar », à Scion, en Suisse, et de vieux horticulteurs « sur la cielette » qui se sentent menacés, mais nous avons les syndicats avec nous (et je n’oublie pas la CGT-SNCF). J’ai confiance en l’avenir

Quand je contemple ces plantations qui sont notre futur, au soir d’une belle journée, je me dis que nous n’avons pas travaillé pour rien. Nous entretenons le cycle de la vie et de l’évolution. Il reste toujours les grandes questions : qui suis-je, ou vais-je…. Mais c’est une autre histoire pour laquelle je ne suis pas compétent (un thème qui sera certainement examiné ultérieurement). Je reste plus terre à terre, c’est une bonne manière d’éviter les coups de blues. Atchao. Araok Atao.


Pascal Legrand

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